Almost - Exposition du 18 septembre au 24 octobre 2010 - OUI - Grenoble


Communiqué de presse :

Après la traditionnelle trêve estivale, OUI accueille Clôde Coulpier, artiste dont les œuvres pourraient pointer les notions de travail, de limites et de sous-jacence. Son exposition s'intitule ALMOST.

Clôde Coulpier propose avec cette exposition une ambiance issue d'une sélection de pièces. Il sent intuitivement l'effet qu'il souhaite produire, et ce avant de savoir quelles œuvres seront présentées. Les pièces doivent venir construire la sensation que l’artiste a, sans mots. Le but du jeu comme il le dit est de « ne pas en faire trop mais d'en faire juste », dans tous les sens du terme. Que ce ne soit pas faux, mais que ce soit presque pas assez. D'où le titre de l'exposition, ALMOST - presque. D'où des pièces telles que la série des Best of, cartes à gratter pré-dessinées dans lesquelles il ne révèle que les traits qui l'intéressent, ne prend que les meilleures parties du sujet proposé par l'éditeur, la dentition d'un requin ou les cornes recourbées d'un mouflon, par exemple.

D'autre part, Clôde Coulpier travaille beaucoup, mais juste ce qu'il faut, sans labeur. Il passe ainsi de nombreuses heures sur les Interruptions, coloriages au stylo noir sur feuille vert fluorescent dont il ne laisse qu'une ligne verte d'un millimètre d'épaisseur. L'effet obtenu est ténu : on ne voit presque plus de vert et pourtant un éclair lumineux surgit de l'obscurité obstinément créée sur la feuille. The Hole, série de dessins au rotring sur calque, participe de la même démarche : afin de dessiner un vide dans un filet de pêcheur, l'artiste décalque méticuleusement les mailles de ce dernier. Ces œuvres prennent du temps, mais de par leur technique simple – coloriage ou décalquage – ce sont des moments d'activité permettant de penser à autre chose, de réfléchir à d'autres œuvres comme à la lecture en cours, à la façon de faire de l'art comme au repas du soir.

Alors pour Clôde Coulpier faire une exposition relève du même rapport au travail : l'exposition est le lieu pour repenser les pièces dans leur agencement, voir ce qu'elles produisent ensemble. Les Armures sont ainsi montrées en intégralité pour la première fois. Ces dessins format A4, une centaine environ, représentent des images de jeunes filles trouvées sur des sites internet pornographiques. Ne sont dessinés que les vêtements portés, les corps apparaissant en creux. La réaction entre les dessins, fins, subtils malgré le sujet, et leur nombre imposant est le résultat de l'actualisation de l'œuvre par l'exposition. Dans une autre salle, Suicidal Tendencies, destructeur d'insectes en fonctionnement, diffuse dans l'espace d'exposition les bruits caractéristiques qui accompagnent son funeste usage. Là encore, la pièce est simple et efficace, déployant une autonomie et un potentiel non prémédités par l'artiste mais observés avec curiosité. Cette autonomie des pièces les fait exister en puissance et crée l'atmosphère de l'exposition, latente et prégnante à la fois.

Les œuvres de Clôde Coulpier ne demandent pas de longs discours, elles n'assoient pas de théories qui émaneraient de l'artiste, elles sont là et parlent d'elles-mêmes. Si le regardeur est disponible, réceptif, ouvert à l’ambiance créée, alors il fait la juste expérience de ce travail. Une « unité rétrospective » se dégage : une image d'ensemble se construit, non univoque, poreuse, pour laquelle les possibilités d'appréhension sont infinies. Il y a une unité molle mais précise qui peut séparer autant que rapprocher les choses. C'est aussi dans cet entre-deux œuvres, dans ce lien, que réside le « presque » cher à l'artiste. Un presque qui sonne terriblement juste.

Pascale Riou